18 AVRIL
2023

Au XVIIe siècle, le mouchoir sert rarement à se moucher

Depuis la civilisation romaine, on utilise un morceau de tissu qui sert à tout sauf à se moucher. On l'utilise pour éponger sa sueur et tout ce qui peut s'essuyer.

Mais au XVIIᵉ siècle, c'est un objet de luxe que l'on tient bien en évidence dans la main pour montrer son niveau social. Il est, pour les plus beaux, en soie, couvert de délicates dentelles, de broderies d'or et parfois de glands. Il fait partie des accessoires de mode comme la mouche ou l'éventail. Il n'est donc pas question d’hygiène mais d'étalage de richesse. C'est un objet très convoité et donc souvent volé, tout comme les montres ou les bourses. Il fait partie des inventaires après succession. Les dames de haute noblesse en possèdent quelquefois jusqu'à trois ! En dehors de signe d'opulence, il sert aussi chez les gens distingués au langage de l'amour : une dame prend bien garde de laisser choir son précieux mouchoir aux pieds de son galant...Au début du siècle , avec l'usage du tabac à priser qui fait éternuer, femmes et hommes étalent sur leur vêtement de grands mouchoirs à fond brun pour préserver la blancheur de leurs dentelles de col. On le surnomme aussi le pleuroir ou le chasse-mouches bien avant de le baptiser le mouchoir à moucher.

Mais alors, dans quoi se mouchait-on ?

Les doigts étaient les plus utilisés mais ce pouvait être aussi un coin de nappe, un pan de manteau. Les manches, même si elles étaient richement brodées, servaient à recueillir le mucus. Les personnes maniérées prenaient soin avant de sortir, d'étaler un linge sur leur manche au cas où. Que de chichis ! D'ailleurs une expression de l'époque nous confirme que "Un homme fort occupé n'a pas le loisir de se moucher".

Le mouchoir est une fantaisie de toutes les tailles et de toutes les formes. Ce sera plus tard Louis XVI qui décidera par lettre patente qu'il devra être carré et ne pas mesurer plus de 60 cm de côté.

Il y a seulement quelques décennies, on offrait facilement en présent une jolie boîte de mouchoirs aux garçons comme aux filles lors des grandes occasions. Le mouchoir demeurera donc longtemps un objet de prestige, avant d'être détrôné par celui moins glamour mais plus hygiénique, en papier.

Mais au temps de La Fontaine, le mouchoir sert aussi à protéger la tête, le cou ou le décolleté. D'où la fameuse réplique du Tartufe de Molière "Ah ! mon Dieu, je vous prie,/Avant que de parler prenez-moi ce mouchoir.//Couvrez ce sein que je ne saurais voir." La Fontaine dans le conte L'Oraison de Saint Julien nous le montre comme objet de séduction : "Un mouchoir noir de deux doigts trop court,/Sous ce mouchoir ne sais quoi fait au tour :/Par là Renaud s'imagina le reste". Dans la fable Le Jardinier et son Seigneur, le seigneur ayant repéré la fille du logis, s'empresse de faire connaissance avec elle, malgré sa pudeur et sa modestie : "Auprès de lui la fait asseoir,/Prend une main, un bras, lève un coin du mouchoir".

On disait aussi des ouvrages de mauvais auteurs, qu'ils n'étaient bons qu'à faire des mouchoirs de derrière ! Encore un autre usage de notre mouchoir...

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